Emission « Sur Le Front » : un nouveau procès à charge déguisé en documentaire

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Le nouvel épisode de l’émission « Sur Le Front » animée par Hugo Clément, diffusé lundi 16 juin à 21h05 sur France 5, était cette fois consacré à la filière française de maïs. Bien loin d’un documentaire journalistique qui aurait dû être étayé, équilibré et nuancé, le reportage a pris des allures de procès à charge et donné à voir une réalisation inexacte, partiale et totalement déconnectée des réalités agronomiques, environnementales et économiques.

La complexité des enjeux agricoles mérite mieux. L’agriculture française mérite mieux ! Cet acharnement est inacceptable. Plutôt que d’attaquer nos agriculteurs et nos filières, nous serions en droit d’attendre une mise en valeur des bonnes pratiques dans le cadre d’une des agricultures les plus vertueuses du monde. Plutôt que de tordre la vérité et faire d’exceptions une généralité, il est temps de sortir d’une vision biaisée de notre agriculture. Les producteurs ne le tolèrent plus et appellent l’ensemble des journalistes et des responsables de médias à garantir des reportages et des débats pondérés, constructifs et honnêtes autour de l’agriculture et de ses multiples enjeux.

Face à cette présentation caricaturale et mensongère, il semble nécessaire à nos organisations agricoles de rappeler un certain nombre de vérités factuelles.

Le maïs, une culture essentielle à notre alimentation

Contrairement à ce qui est affirmé, près de 90 % du maïs cultivé en France est destiné à l’alimentation humaine – directe ou indirecte – en France et en Europe. En plus de nous nourrir pour partie, le maïs permet de nourrir nos élevages laitiers, porcins, avicoles… et donc de produire notre alimentation d’origine animale. Seulement entre 7 et 10 % du maïs que nous cultivons est valorisé pour des usages non-alimentaires : notamment la production de biogaz, de biocarburants ou de plastiques biosourcés.

Assurer l’approvisionnement des élevages français pour répondre à la consommation

Alors que la part des protéines animales consommées en France représente 70 %, il est essentiel de sauvegarder des filières végétales et animales fortes pour assurer la sécurité de nos approvisionnements et l’économie de nos filières. Le maïs, qu’il soit en grains ou en fourrage, est utilisé par les éleveurs de bovins, de porcins et de volailles partout en France afin de nourrir leurs animaux. Il est un apport complémentaire essentiel dans des rations équilibrées et diversifiées : c’est une excellente source d’énergie qui offre une garantie de résilience et de souveraineté alimentaire pour nos filières d’élevage.

Méthanisation et bioéthanol : une diversification bien loin d’être un débouché principal

Affirmer que « le maïs finit souvent dans des méthaniseurs » est parfaitement mensonger : seuls 2,5 % des surfaces de maïs cultivées en France sont utilisées pour la méthanisation. Quant au bioéthanol produit grâce au maïs, qui permet également la coproduction de 150 000 tonnes de drèches par an utilisées pour l’alimentation animale, il ne représente que 4 % des surfaces, bien loin donc d’être un débouché principal pour le maïs français. Ces chiffres avaient été transmis en amont à la production de l’émission qui ne peut donc les ignorer.

Une plante qui se contente très majoritairement de l’eau de pluie

En effet, comme absolument tous les végétaux, le maïs consomme de l’eau et n’en consomme pas plus que les autres cultures. Ce que le reportage ne dit pas, c’est que seulement un quart des surfaces de maïs est irrigué et que la grande majorité de l’eau prélevée est restituée au milieu soit directement par le sol, soit par évapotranspiration et qu’une partie de cette eau est valorisée à travers notre alimentation. Lorsque les cultures sont irriguées, elles le sont à bon
escient et en conformité avec la réglementation qui encadre les prélèvements, contrairement à ce que reportage tente de nous faire croire. Pour exemple, on estime en moyenne que 226 millions de m3 transitent dans le gave d’Oloron en juillet et août et que l’irrigation n’en consomme seulement qu’environ 1%, bien loin de l’image irresponsable donnée par le documentaire de façon trompeuse.

L’export, un levier pour la souveraineté européenne

Si 32% de notre production nationale de maïs est bien exportée, il est important de dire que c’est à 98% vers l’Europe afin de servir la souveraineté alimentaire du continent qui est régulièrement le premier importateur mondial de maïs devant la Chine. Ne pas produire en France le maïs dont on a besoin au sein de l’Union européenne reviendrait à importer encore davantage de maïs d’Ukraine ou du Brésil, produit avec des standards sociaux et environnementaux moins stricts que ceux qui sont demandés à nos producteurs avec un bilan écologique, notamment carbone,
bien moins favorable.

Des semences hybrides au service d’une innovation essentielle pour répondre aux enjeux agricoles et environnementaux

Les hybrides de maïs, largement critiqués dans le reportage, sont des croisements entre deux variétés sélectionnées soigneusement pour créer de nouvelles variétés réunissant des caractères intéressants (résistance, rendement, goût, conservation etc…) afin de s’adapter aux enjeux et aux besoins d’aujourd’hui et de demain. Ce type de croisement qui existe spontanément dans la nature depuis la nuit des temps représente, lorsqu’il est accompagné par l’Homme, une innovation et un progrès au service des enjeux de l’agriculture et de l’environnement ! Il est essentiel pour l’agriculture de continuer à s’appuyer sur la sélection variétale afin de garantir régularité et sécurité à la production.