AGPM info économie 573 spécial Congrès 2021

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Fierté et détermination ! Notre congrès de Tours a permis à notre filière de se retrouver. Enfin ! Que de débats ! Passionnants, diversifiés, parfois houleux. Et malgré les difficultés soyons fiers du travail accomoli. Fiers d’être parvenus à changer la trajectoire de la PAC dont les premières moutures auraient été fatales à bien des exploitations maisicoles. Fiers d’avoir mis sur le devant de la scène / assurance et la gestion de l’eau. Fiers d’être ambassadeurs d’une culture créatrice de valeur ajoutée dans nos territoires. Quant tout semble perdu d’avance, il faut continuer à y croire et s’organiser collectivement avec rigueur et détermination. Et cette détermination collective doit perdurer car rien n’est acquis.

Le chiffre du mois : 11 Tonnes ! C’est le rendement moyen de la production annuelle de maïs grain annoncé au Congrès, un record qui démontre, une fois de plus, tout le potentiel de la maïsiculture française.

Les acteurs de la filière maïs se sont retrouvés les 9 et 10 novembre à Tours à l’occasion du Congrès annuel du maïs qui a réuni près de 500 personnes : agriculteurs, semenciers, collecteurs, acteurs de la protection des plantes et de la recherche, institutionnels et journalistes.

Le thème de l’année, « Horizon maïs 2025 : allier souveraineté et compétitivité », a permis de montrer que le maïs est une source de création de valeur dans nos territoires, alors que la culture affiche cette année un record de rendement. Outre l’Assemblé Générale de l’AGPM, ce congrès des retrouvailles a rassemblé les différentes composantes de la filière : semenciers maïs, producteurs de maïs semences, interprofession des semences de maïs et de sorgho et les irrigants de France. Retour sur l’ensemble des assemblées.

MAÏS SOLUTION AUX DÉFIS ALIMENTAIRES ET CLIMATIQUES

L’Assemblée générale de l’AGPM a permis de démontrer toute l’étendue de la création de valeur permise par la plante maïs. Il est donc stratégique de préserver une maïsiculture française forte, en particulier à travers les vecteurs suivants.
• La PAC, dont le nouveau cadre a été présenté par Pierre Bascou et dont le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie (intervenant en vidéo), a souligné les avancées et son action pour consolider les aides au revenu et soutenir les transitions, en particulier grâce à un écorégime accessible et tenant compte des spécificités de la culture. Le Président de l’AGPM, Daniel Peyraube, a salué l’action collective allant vers un aménagement des mesures de rotation qui devraient préserver les territoires maïsicoles, et, plus largement, des pratiques agricoles locales vertueuses.

• La gestion des risques dont la réforme, présentée par le Député Descrozaille, devrait permettre de mieux protéger la maïsiculture des aléas, mais à condition de mettre pleinement en place le règlement OMNIBUS comme l’a affirmé Franck Laborde, Secrétaire Général de l’AGPM.
• Le refus d’importer ce que nous ne pouvons pas produire et la fin des distorsions de concurrences intraeuropéennes, l’aboutissement d’une règlementation rendant accessible les nouvelles techniques de sélection, le maintien des solutions de protection des cultures existantes tant que les alternatives ne sont pas disponibles… autant de sujets sur lesquels la présidence française de l’UE est attendue et rappelés par Jean-Marc Shwartz, Secrétaire Général Adjoint.
Renforçant ces propos, la Présidente de la FNSEA Christiane Lambert a souligné le chemin parcouru sur la PAC même si certaines mesures comme l’écorégime imposeront des adaptations dans les exploitations qui devront être accompagnées et expliquées. Elle est également revenue sur un contexte beaucoup plus porteur pour l’agriculture française, reconnue par le gouvernement comme un secteur stratégique pour notre pays et la nécessité d’avancer grâce à un syndicalisme de solutions. Quant aux atouts de la filière maïs, ses efforts de recherche et d’adaptation ont été illustrés dans une table ronde. Claude Tabel, Président de l’UFS, a montré l’évolution de la sélection variétale focalisée sur la régularité du rendement dans un environnement toujours plus contraint (disparition de molécules, évolution climatique) et la nécessité pour cela de pouvoir accéder aux nouvelles techniques de sélection. Jean-François Loiseau, Président d’Intercéréales (l’interprofession céréalière réunissant les acteurs de la production, de la collecte et de la première transformation), est revenu sur les trois enjeux de la filière :
• augmenter la production,
• améliorer sans relâche la qualité,
• tendre vers la neutralité carbone à horizon 8-10 ans et surtout, rappeler sans relâche le rôle de la production végétale dans la captation de CO2.
Anne-Claire Vial, Trésorière de l’AGPM et Présidente d’Arvalis, a rappelé l’engagement dans la durabilité, dans l’écoute et la transparence vis-à-vis des citoyens et des consommateurs ; une attitude pour laquelle l’AGPM est précurseur en matière d’écoute des parties prenantes, d’engagement sur le carbone et de volontarisme, en matière de certification environnementale, affichés au Congrès de Toulouse en 2019. Enfin, le Président Daniel Peyraube a salué la force de mobilisation de toute la filière maïs, aux côtés de ses partenaires des grandes cultures et de la FNSEA, qui a permis de faire évoluer la future politique agricole. Mais que ce soit en matière de PAC, de gestion des risques, d’accès à l’eau et aux nouvelles biotechnologies : la vigilance reste de mise et la mobilisation doit se poursuivre.

MAÏS SEMENCE : UNE PRODUCTION FRANÇAISE PERFORMANTE

L’assemblée AGPM Maïs Semence a dressé le bilan d’une campagne de production plus favorable que les 2 précédentes puisque le résultat technique devrait être très proche de l’objectif. Avec 85 000 ha de production de semences de maïs hybrides, soit le second plus important programme historique
en France, c’est une performance. Comme l’a souligné le président Pierre Vincens, la situation économique des multiplicateurs va s’améliorer en 2021 sous l’effet de la hausse des cours du maïs grain, sur lequel est indexé la rémunération des producteurs de semences de maïs, mais aussi sous l’effet de revalorisations contractuelles. Pour autant la situation reste fragile et la hausse des prix de l’énergie, des engrais ou de la main-d’oeuvre, impactera les coûts de production en 2022. Ces éléments devront donc être pris en compte alors que les surfaces de production devraient rester élevées lors de la prochaine campagne. Les différentes interventions ont permis d’exposer les travaux et résultats obtenus, qu’ils soient économiques, règlementaires et techniques. Mentionnons par exemple : l’obtention d’un nouveau contrat à la variété chez le principal assureur, la réalisation d’une animation pour l’aide au recrutement des saisonniers, des demandes de dérogations pour lutter contre certaines impasses techniques et la poursuite des actions techniques pour améliorer les performances de la culture, notamment en matière de compétitivité. Un travail payant puisque 46 % des surfaces de multiplication de l’UE sont françaises et que notre pays reste largement leader.

RECHERCHE SEMENCIÈRE : UN GAGE DE SOUVERAINETÉ

La Section Maïs et Sorgho de l’UFS a rappelé que la force des semenciers repose sur plusieurs atouts comme l’implantation territoriale des entreprises, leur interaction constante avec les filières agricoles et alimentaires, la contractualisation des relations entre acteurs, et un niveau élevé d’investissement en recherche et développement. Ces atouts permettent de développer une activité économique
dynamique en conjuguant souveraineté et compétitivité. Afin de préserver cette dynamique, la Section Maïs et Sorgho de l’UFS a souhaité sensibiliser la filière aux enjeux suivants :

• la revalorisation des rémunérations des agriculteurs multiplicateurs en 2021 ;
• l’augmentation des coûts de productions observée par les semenciers : prix des commodités inclus dans les produits bruts, hausse brutale du coût du gaz en pleine collecte, coûts et disponibilité du transport, etc… ;
• les impacts à venir de l’article 83 de la loi EGAlim sur l’activité de traitement des semences pour l’export effectué par les semenciers ;
• une réglementation européenne adaptée pour permettre aux entreprises semencières d’utiliser les outils issus des connaissances scientifiques pour la sélection variétale afin de garder leur capacité d’innovation et de mieux répondre aux enjeux de la transition Agro-écologique. Enfin, la Section Maïs et Sorgho de l’UFS, ARVALIS et le GEVES, ont présenté Varmaïs, le nouveau site de référence de l’évaluation variétale en maïs (www.varmais.fr).

CONSOLIDER LE LEADERSHIP DE LA SEMENCE FRANÇAISE

L’Assemblée Générale de la FNPSMS a permis aux deux familles de professionnels de confirmer l’intérêt du travail mené au travers des différentes activités de l’interprofession : l’expertise économique (veille des marchés des semences en Europe), les actions techniques dédiées aux semences (implantation de la culture, lutte contre les ravageurs, pulvérisation ciblée…), l’inspection des cultures (85 000 ha de semences de maïs et 900 ha des semences de sorgho avec un site internet d’aide au recrutement des techniciens d’encadrement), le laboratoire (avec l’accroissement des analyses et édition de bulletins pour les semences exportées), la promotion des semences françaises (mais aussi de la culture, en France, dans l’UE, à l’Est et au Proche-Orient). La filière française de production de semences de maïs et de sorgho demeure dynamique et compétitive en France, et leader mondial à l’export. La production 2021 est au rendez-vous en termes de quantité et de qualité, dans un
contexte de marché porté par les prix du maïs de consommation. Cependant, les professionnels, confrontés à des enjeux tels que la pénurie de main d’oeuvre, la hausse du prix des intrants, l’adaptation aux évolutions réglementaires ou encore, la valorisation de la semence, ont exprimé des attentes sur le partage de la valeur et le besoin d’une vision de développement de la filière à long terme. Cela a amené le président Pierre Pagès à renouveler « l’ambition collective de consolider le leadership de la filière, grâce à un travail de co-construction engagé avec les professionnels ».

L’IRRIGATION : ACTIVITÉ D’INTÉRÊT GÉNÉRAL MAJEUR

L’Assemblé Irrigants de France a permis, dans un contexte tendu par la destruction d’une réserve en Charente Maritime, de revenir sur l’ensemble des travaux de l’année avec des réussites. Comme par exemple : le matériel d’irrigation et les outils de gestion de l’eau éligibles au plan de relance, des avancées dans la gestion quantitative de l’eau, la présence d’Irrigants de France dans le groupe 3 du Varenne de l’eau « vision partagée et raisonnée des ressources en eau ». Mais aussi des sources de préoccupations telles que la fragilité juridique des OUGC ou l’arrêté « plans d’eau » susceptible d’anéantir tout projet de petite hydraulique. Le président Éric Frétillère a affirmé la priorité de la communication et surtout de l’expertise juridique dans le travail mené. Il a également rappelé que l’eau est au coeur des enjeux liés à la volonté de la France d’assurer sa sécurité alimentaire. La table ronde « Quel avenir pour l’irrigation dans un contexte de changement climatique ? » a permis de préciser les points de vue de plusieurs intervenants : Emmanuelle BOUR POITRINAL (Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation), Bruno CINOTTI (Ministère de la Transition Ecologique), Yves GRANGER
(Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation), Olivier THIBAULT (Ministère de la Transition
Ecologique). A cette occasion, Éric Frétilllère a rappelé que la France ne manque pas d’eau, et que
si le changement climatique se traduit par une répartition de plus en plus inégale dans l’année, cela doit nous amener à une réflexion globale sur la garantie de son accès en période de pénurie. C’est un enjeu capital pour l’avenir de la production agricole sur notre territoire. L’objectif d’IRRIGANTS de France sera, pour les prochains mois, de faire reconnaître l’agriculture comme une activité d’intérêt
général majeur. Les travaux du Varenne de l’eau doivent permettre de sécuriser l’accès à l’eau, d’assurer sa gestion collective dans le temps et de développer les ressources en eau, y compris à travers le stockage.

QUAND ON A LES JETONS, ON EST MOINS CONS !

Erik Orsenna était le grand témoin du Congrès. L’écrivain immortel (écrivain membre de
l’académie française, économiste, géographe, spécialiste des questions d’agriculture et d’alimentation) a porté son regard éclairé et bienveillant « Par rapport à ce début de campagne présidentielle débile, enfin on pose les vraies questions ». Il a, à cette occasion, exprimé 7 convictions. Extraits choisis :

La première c’est que l’avenir va être chaud car nous allons devoir affronter des raretés en volume et dans la répartition. Les raretés en répartition c’est bien pire que les raretés en volume : ce sont des raretés dans les lieux et dans le temps. … Le prochain livre que je fais paraître, après 25 ans de voyage le long des fleuves sera « Guerre et paix au royaume des fleuves »… Ce que j’ai entendu ce matin,
c’est la même chose. … Donc ce défi que nous avons au niveau national est passionnant. Mais est-ce que la démocratie est capable d’arriver à des solutions ?!

Deuxièmement, merci à la pandémie. Parce que quand on a les jetons on devient moins con. On est revenu aux fondamentaux de la souveraineté… Il n’y aurait pas eu cette pandémie, on considérait que l’agriculture c’était réglé… L’évidence revient parce que l’être humain adore oublier surtout quand
c’est un peu menaçant… Ma terreur c’est que ces fondamentaux on les oublie. Il n’y a pas seulement le développement qui doit être durable, la mémoire aussi !

3ème question : Sans bonne échelle, il n’y a pas d’action utile… c’est de l’agitation. Et l’échelle est double : spatiale et temporelle. Je me disais que la bonne échelle pour les réformes agricoles c’est la région et l’Europe. Mais j’ai fait deux erreurs :
• dans les régions, il faut aller plus précisément dans le maillage,
• et la nation existe… elle revient : on le voit aujourd’hui, le plan stratégique national, c’est clé.
La réforme de la PAC, s’il n’y a pas une stratégie nationale, ça ne marche pas. Deuxième échelle, c’est
l’échelle temporelle. Quand j’entends dire aux agriculteurs de s’adapter, franchement ! Quelle corporation s’est autant adaptée que les cultivateurs. Il faut continuer, bien sûr.

4ème point : 2 vérités sur la mondialisation.
• Répétez sans arrêt que le premier continent importateur de maïs c’est l’Europe. Et quel maïs importons-nous ?
• La France et l’Europe ne sont pas seulement un jardin : on est là pour produire… Et pourquoi se priver d’un des plus formidables atouts qu’a notre pays ?

5ème point : Les solutions viennent de la recherche. Premièrement, la recherche c’est une chaîne
qui va de la recherche fondamentale à la recherche appliquée. Si vous n’avez pas de recherche fondamentale, ça ne marche pas. Mais si vous n’avez pas de la recherche appliquée, vous restez sur place. Deuxièmement, c’est un effort national. La dépense que nous octroyons à la recherche, par rapport à notre produit intérieur brut et de 2 % chez nous, 3,1 % en Allemagne. Cette sorte de paresse se paye ! Troisièmement, on ne trouve pas toujours. Donc il faut continuer. Quatrième. On trouve ensemble par le récit et par ce qu’on appelle la science participative. Tous les agriculteurs, de par la diversité de leurs expériences, sont des chercheurs.

Avant-dernier point : le partage – le bon partage – à l’intérieur de la consommation. Le budget consacré à l’alimentation dans une famille est passé de 30 % à 13 % pendant que le budget de l’Immobilier a explosé. Est-ce une société bonne que celle-là ? La question de la rémunération et évidemment du partage entre ceux qui produisent ceux qui distribuent… c’est une question clé.

Dernier point, le récit : ce que je vois de votre action de communication c’est clé, parce que le pire risque, c’est de rester dans son ghetto en nourrissant une colère – que je comprends – mais qui va vous détruire vous-même et dont les autres n’ont absolument rien à faire. Le personnage du maïs est formidable,… C’est drôle parce qu’on attaque le maïs en disant que c’est une plante tropicale… Mais tant mieux qu’on ait une plante tropicale dans le cadre d’un réchauffement climatique !